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[ITW] L'agriculture urbaine s'impose en ville

L’agriculture urbaine est l’une des démarches innovantes que promeut les écologues d’ELAN. Cette solution est essentielle à la réintroduction de la nature en ville. Eclairage avec Martin Sénéchal, Ecologue spécialiste de la biodiversité urbaine.


Pourquoi l’agriculture doit-elle prendre toute sa place en ville ? Quels en sont les bénéfices ?

Aujourd’hui on sait que les villes ont une résilience alimentaire très faible. Par exemple, si on coupe la ville de Paris du marché de Rungis, la capacité à stocker permet un approvisionnement de trois jours seulement ! Certains acteurs de la filière disent que l'agriculture à toute sa place en ville car elle permet de recréer de la ressource alimentaire et de rendre les villes autonomes. Selon moi, c’est un vœux pieu qui n’a pas vraiment de sens. L’agriculture urbaine répond avant tout à un besoin de la part des urbains, de se reconnecter avec la nature.


Notre société est en effet déconnectée de la nature, de l’agriculture, et de la campagne. Tout en étant encore plus déconnectée du monde sauvage. Peu d’urbains passent plus de 3 jours par an dans une forêt ou au sein d’un réel espace nature et peu sont ceux qui pratiquent une vraie activité agricole. En pratiquant l’agriculture urbaine, nous sommes dans l’action- planter, semer, récolter - ce qui permet de recréer ce lien. Voilà pourquoi à mon sens, l’agriculture urbaine à toute sa place en ville.

Les bénéfices de l’agriculture urbaine varient cependant en fonction des zones géographiques et des typologies de quartier. Dans un quartier populaire l’agriculture urbaine est vectrice de lien social tout en constituant un coup de pouce économique. En permettant aux foyers les plus modestes de cultiver, nous favorisons leur pouvoir d’achat et améliorons l’alimentation tout en favorisant des bénéfices environnementaux. En effet, l’agriculture urbaine permet de consommer des produits frais en hyper local et donc de réduire son empreinte carbone.

Dans cette logique, certains restaurateurs arrivent à s’approvisionner uniquement en plantes aromatiques qui ne poussent que sur les toits de Paris. Dans les quartiers plus aisés, les objectifs sont différents et ces projets d’agriculture urbaine apportent une forte valeur biophilique aux habitants (cultiver soit même, fierté de cultiver sa propre alimentation).


Quels sont les moyens recommandés pour intégrer l’agriculture en ville ?

Aujourd’hui l’agriculture urbaine va à plusieurs vitesses avec d’un côté, des projets portés par des structures déconnectées de la ville et de ses enjeux et de l’autre côté, une émergence de projets hypersociaux ou finalement le volet productif est moins important que le volet social associé. Et puis Il y a des projets hybrides avec les potagers d’entreprise ou des jardins ouvriers par exemple.


Ma recommandation est d’avoir de l’agilité dans le choix des typologies de projets et de la gestion à mettre en œuvre : selon les lieux, les acteurs, la population, la création d’un jardin partagé n’est pas à réaliser de la même façon. Dans certains cas il faudra par exemple envisager un partenariat avec une entreprise capable de faire de l’animation ou du suivi de culture . Dans d’autres cas, il faudra envisager la création d’une association ou encore la mise en place d’une gestion par un Community Farmer bénévole…

Cette agilité est possible sous réserve de :

  • Connaître les attentes des habitants du quartier

  • La rationalité dans les choix que nous réalisons (Mode de gestion facile, Faciliter le lien d’usage au site)

  • L’anticipation de l’impact environnemental que l’on veut créer. En effet certaines typologies d’agriculture urbaine ont un impact négatif avec des moyens de production peu justifiés.

Et techniquement, Quid autour de la consommation d’eau, de la maintenance et de l’exploitation de la ressource ? Pour avoir une agriculture qui soit censée en ville, il faut choisir de mettre en place des moyens frugaux, des solutions agiles et de bon sens. Par exemple :

  • Mettre en place des bacs en calepinage quand on a une toiture peu portante permet d’utiliser une toiture a faible portance.

  • Privilégier la réutilisation d’eau pluviale plutôt que d’installer des pompes de relevage.

  • Faire attention aux matériaux dans lesquels poussent les légumes mais aussi à la typologie des toitures car certaines (Les toitures en Zinc, plomb) très présentes à Paris, dégagent des métaux lourds dans l’eau et sont donc source de pollution pour nos légumes. La principale source de pollution des légumes se faisant par substrats.

A quelle(s) phase(s) d’un projet, les constructeurs peuvent-ils prévoir ces espaces verts dans les projets de bâtiments ?

C’est en réalité le Développeur immobilier qui tient cette réflexion entre ses mains mais c’est bien 90% des projets qui mériteraient d’avoir un jardin. L’équipe projet doit réfléchir à la typologie du quartier pour programmer le jardin et anticiper l’usage qui y sera fait. Le jardin est quand même réalisable à toutes les phases d’un projet. Sur un chantier, pourquoi ne pas mettre en place un potager, véritable lieu de convivialité pour les compagnons ? On se rend mieux compte de la faisabilité lorsque le programme se construit. Quelques exemples ...



Le Biotope : sa terrasse fait partie de l’esprit même du projet. Elle a été pensée par l’architecte lors de la première phase du concours, totalement orientée vers le bien-être des utilisateurs. Telle une forêt urbaine, elle se compose d’arbres fruitiers (pommiers, poiriers, pruniers sauvages sur le toit) et de la présence de potagers intégrés sur le site étalés sur des zones en sous-bois. Le bâtiment filtrant pour la ville, s’inscrit complétement dans sa continuité grâce à l’anticipation des usages.


L’écoquartier à Vannes Beaupré Lalande : nous avons réfléchi à l’apport d’une vie-nature au cœur d’une zone pavillonnaire avec un espace dédié à de la prairie. Nous allons créer un espace pédagogique avec l’intégration de moutons et d’ânes permettant aux enfants d’être proches des animaux tout en habitant à 7 minutes du centre-ville de Vannes ! Voilà un projet de reconnexion de néo-urbains à la nature.


Pourquoi pas à Challenger : L’agriculture urbaine est une démarche qui s’inscrit dans la politique RSE d’entreprises soucieuses de leur impact positif ! l’imaginer à Challenger est à mon sens une très bonne idée pour Bouygues Construction.


J’imagine déjà le parc de Challenger géré en éco pâturage (Par l’intermédiaire de mouton), qui permettront de limiter l’impact carbone et le coût des tontes associés à la gestion de ce site. J’imagine également la mise en place des jardins potagers utilisables par les salariés, une action créatrice de valeur (Lien social, sentiment d’appartenance à l’entreprise, envie de venir au bureau) notamment pour les jeunes salariés avares de toujours plus de nouveaux services en entreprise. Et vous, vous imaginez-vous manger des produits qui poussent sur le site géré par une association ?

Il y a autant de projets d’agriculture urbaine qu’il existe de projets urbains. C’est à mon sens un formidable outil de développement, de favoriser le lien social, de créer des rapports biophiliques, de limiter les charges pour les exploitants. Il y a une agilité énorme dans ce type de projets. Les bénéfices d’un projet d’agriculture urbaines seront toujours favorables.

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